Interview on Rose McGowan by Libération in 2018 - Inscris-toi gratuitement et surfe sans pub !
Révélée dans les années 90 par le film Scream, l’Américaine Rose McGowan a été la première actrice, bien avant que l’affaire Weinstein n’éclate, à révéler qu’elle avait été violée par le producteur hollywoodien, sans le nommer dans un premier temps. Elle vient de publier un livre, Brave, qui se veut un manifeste pour aider les femmes à reprendre le contrôle de leur vie et de leur carrière. De passage à Paris, elle s’est adressée à Sandra Muller, la créatrice de #BalanceTonPorc, qui l’a orientée vers la Fondation des femmes. C’est ainsi qu’elle s’est impliquée dans la campagne «Maintenant on agit». Dans le studio de prises de vue mis à la disposition des actrices par Libé, elle va de l’une à l’autre, cheveux ras, enveloppée dans un peignoir ironiquement siglé Comme des garçons.
Cela fait des années que j’y pense, que je me demande comment couper la tête du diable [elle ne prononce jamais le nom de Weinstein, ndlr]. Il y a un an, j’ai commencé à travailler avec Ronan Farrow sur les articles dénonçant le traitement des femmes à Hollywood. J’écrivais Brave en même temps, mais je voulais que les articles sortent avant le livre, sinon personne n’aurait compris mon message. Aucune de nous ne mérite de vivre dans la peur. Les femmes doivent savoir que leur voix compte. Durant ces années où je réfléchissais à ce qui m’était arrivé, je me disais que si je pouvais augmenter la prise de conscience des femmes, ne serait-ce que de 10 %, j’aurais rempli mon objectif. Je suis une #MeToo, je ne suis pas #MeToo. #MeToo est chacune d’entre nous, dans un club où nous n’avons pas mérité de figurer. J’ai déclaré la guerre à un système de pensée qui fait beaucoup de mal au monde.
Que les femmes peuvent subir le même lavage de cerveau que les hommes. Si elles regardaient leur vie et réalisaient à quel point elles ont été utilisées et abusées, elles deviendraient dingues. Ces femmes-là ont peur de la réalité. Mon but est justement de changer la façon de penser des plus âgées. Les jeunes sont acquises à la lutte contre les agressions. Si je pouvais pousser leurs aînées à se regrouper… Mais je ne désespère pas, des femmes de 85 ans ont posté des photos d’elles avec mon livre !
Je veux parler à Emmanuel Macron. Je voudrais qu’avec sa merveilleuse femme, ils s’investissent sur ces sujets, qu’ils fassent avancer cette cause. Macron doit protéger sa population, qui paie des impôts pour l’être ! Ce serait une marque de grandeur et cela lui permettrait de laisser une trace forte dans l’histoire. Il faut qu’il pousse la justice à bouger. Je ne m’adresserai pas à lui avec colère, je serai constructive. Je veux qu’il soit formidable, pas seulement bon.
Je pense que la bravoure, le courage sont de très grandes qualités, c’est le message que je veux porter un peu partout, et l’Amérique de Trump ne peut plus en faire preuve. C’est pourquoi j’ai quitté les Etats-Unis, j’hésite encore à m’installer à Paris ou Berlin. Les Etats-Unis sont dans une spirale négative, bien trop dangereuse.